Laurence : Bêtise de rêve.

 

 

Je crois que mon père a toujours fait des bêtises, en tous cas, il les raconte à merveille et certains « exploits » nous ont longtemps fait rêver, mon frère et moi !

Déjà, ma grand-mère nous faisait nous tordre de rire avec l’histoire du passage de la ligne de démarcation de la zone libre vers Bléré, déplorant que mon père, alors tout bébé car né pendant la guerre, charme tout en risettes et fossettes une dame de l’armée Allemande qui avait entrepris de vérifier l’intérieur de ses couches… (On n’est jamais trop prudent avec le marché noir, et hop un jambon planqué dans les couches, à moins que ce soit une mitraillette… ?)


Donc voici le tableau : Mon père, les fesses à l’air, en train de glousser devant les gazouillis de cette charmante teutonne, et ma grand-mère enrageant à côté qu’il soit si aimable avec l’Ennemi !!!


Avec des débuts aussi charmants, la voie du polisson était ouverte !

Mon grand-père étant mort accidentellement et très jeune, ma grand-mère se retrouva avec trois garçons à élever, « d’une main de fer dans un gant de velours » et mon père fût certainement le plus turbulent des trois.


De plus, quelques années après la mort de leur père, les trois enfants et leur mère ont échappé de peu à l’incendie qui a ravagé tout l’immeuble dans lequel était leur logement. Tout le bâtiment était en feu mais mon père voulait « continuer à dormir » alors que son frère ainé essayait de le réveiller, ils n’ont eu le temps que de prendre leurs manteaux et d’assister à l’impressionnant spectacle !

Tout ceci donne certainement une formidable envie de vivre et de se transformer en « risque-tout ». Donc il y eût maints exploits sur la Loire, aux Châteliers, Sur la Butte de César et sur l’Amasse.


Et c’est là qu’arrive notre histoire préférée, celle qui nous a tant fait rêver mon frère et moi, celle pour laquelle nous avons concocté tant de plans qui ont lamentablement échoué.

 

L’Amasse donc, point de départ de l’épopée souterraine de môsieur notre père en culottes courtes. Avec deux de ses amis de l’époque, ils avaient fabriqué un radeau avec lequel ils sont partis, depuis ce qui se trouve être maintenant le restaurant l’Ecluse, sous le centre-ville d’Amboise, au gré de la rivière.

Et là, mon père nous racontait le noir, les gros rats d’égouts, la piteuse lumière de leurs lampes torches, l’eau sombre et sale…et leur déambulation tranquille sous le « quai des Marais » (Le nom de cette rue vient du fait que l’Amasse n’a pas toujours été recouverte à cet endroit.)

Arrivait ensuite le moment qui nous réjouissait le plus : ils parvenaient sous la rue Nationale, au niveau de l’Horloge, et là, peinards, ils allaient voler des bouteilles de vin (de piquette paraît-il…) dans la cave d’un infortuné Amboisien qui avait donc un accès sur l’eau, une porte sur laquelle il était naïvement écrit : « Attention Cave Piégée ».

Puis après leur petite razzia, les idées sûrement plus très claires, ils continuaient leur périple sous la ville jusqu’à ressortir dans la Loire au niveau de la nouvelle passerelle.

Et nous, cette aventure là nous fascinait.

Et nous avons fait des plans,

Et nous avons fait des radeaux qui ne flottaient jamais.

Et on s’est fait rattraper et gronder par notre mère qui nous trouvait les pieds dans la vase…

Que de bons souvenirs mais quel regret de ne jamais avoir pu voir ce qu’il a vu !

Dans ma tête, j’ai toujours imaginé la scène comme la fuite dans les égouts de Paris dans « La Grande Vadrouille », alors que cela avait certainement beaucoup moins d’allure, c’est sûr…mais…

 

 

 

C’était notre bêtise de rêve !